lundi 8 mars 2021

Rapport de M. Benjamin Stora ....

 

Rabah Bouguerra

21, avenue Julien Bailly

46100 Figeac

Tél. 0679652322

Email. h.r.bouguerra@gmail.com

 

 

Figeac, le 15 février 2021.

 

Objet : rapport sur les questions mémorielles …

 

Monsieur Benjamin Stora.

Cher Monsieur,

 J’ai lu avec beaucoup d’intérêt et d’attention, votre rapport sur « les questions mémorielles portant sur la colonisation et la guerre d’Algérie » que vous venez de remettre à Monsieur Emmanuel Macron, Président de la République.

 J’ai beaucoup appris de ce document qui parfois nomme des faits ou des situations de façon trop consensuelle. Aux amis, il faut dire la vérité, c’est la seule façon qui permet de progresser et de nouer de nouvelles et solides relations. « A mal nommer les choses, disait Albert Camus, on accroît les malheurs du monde. »

 J’ai relevé un fait historique inexact, probablement mineur mais dont l’interprétation  interroge et divise. Vous situez le début des « massacres » des harkis en juillet 1962, comme le fait votre collègue, Jean-Jacques Jordi dont les arrières pensées apparaissent clairement.  Jean-Jacques Jordi veut tout simplement exonérer la France de ses responsabilités. Ces « massacres » avaient commencé  quelques  semaines après le cessez-le-feu, du 19 mars 1962 comme l’avaient rapporté d’autres observateurs. Je pourrais vous mettre en relation avec un témoin qui à l’époque des faits avait une quinzaine d’années.

 Ce même témoin, m’a permis d’écrire l’introduction d’une fiction autour du parcours des harkis. « La forfaiture du corbeau » (aujourd’hui sans éditeur mais disponible sur certaines plateformes). Ce roman a été relativement bien accueilli tant par les ayants droit de harkis que par ceux que l’Algérie touche de près ou de loin. Il a obtenu le Prix du Lions de littérature 2013, pour la région  Provence- Alpes - Côte d’Azur et Corse. Il a été salué par la presse locale mais aussi par Marianne, avec une belle critique de Martine Gozlan, l’éminente spécialiste des questions arabes et maghrébines ainsi que par Courrier international à l’occasion des 50 ans de l’indépendance de l’Algérie. Si vous le souhaitez je me ferais un plaisir de vous l’envoyer.

 Si le camp de Saint Maurice l’ardoise avait préalablement « accueilli » les militants de l’indépendance de l’Algérie  pour devenir un lieu d’enfermement des harkis et leurs familles, il en a été de même pour celui du Larzac, précisément à La Cavalerie. 

La mémoire aura du mal à être partagée tant certains mots éloignent, aujourd’hui encore,  les deux rives de la Méditerranée. Ainsi, on peut  lire dans votre rapport, à propos de cette exposition en Bretagne qui présente « un couteau ramassé sur le corps d’un fellagha, sans guillemets ni renvoi  (p.73). Fellagha (pluriel de fellag,  était un petit métier de service qui consiste à « exploser » (arabe algérien) des bûches de bois, aujourd’hui, en France,  on dit tout simplement, couper le bois)  est un terme péjoratif pour nommer les résistants de la cause algérienne. Si on tient  compte de sa mauvaise orthographie, le h n’a pas lieu d’y être, donnant un son totalement différent. Ce mot n’a pas sa place dans un dialogue de réconciliation.

 La place de l’histoire et plus particulièrement celle de la colonisation est liée à celle de l’éducation dont vous recommandez l’amélioration et le développement comme le fait Jean Louis Roy. Or les gouvernements successifs ont laissé le système éducatif partir à la dérive. Pendant des décennies, 160 000 jeunes quittaient,  annuellement, les dispositifs éducatifs en situation d’échec. Ces jeunes qui se concentrent, essentiellement, dans les grandes banlieues, sont d’origine africaine et maghrébine. Ils sont en première lignes et de fait, les victimes, dans ce que beaucoup appellent « les territoires perdus de la république ». 10 millions de français n’ont pas le bac et 3 millions sont dans une situation de détresse absolue au regard de la maîtrise de la langue française. Dans cette situation, il n’est guère possible d’imaginer un  avenir radieux.

Et pourtant, une vraie solution existe et qui donne des résultats prodigieux mais les responsables, à haut niveau,  n’en veulent pas. Cette petite clé qui ouvre de grandes portes a un nom : le diplôme d’accès aux études universitaires par abréviation le Daeu. C’est l’équivalent de plein droit du baccalauréat. Avec cette appellation, il existe depuis plus de 25 ans mais sous son appellation originelle, il a plus de 50 ans ! Je l’avais personnellement expérimenté pendant 12 ans, en partenariat avec l’université de Toulouse Jean Jaurès. Partant de cette expérience, il suffirait de mettre en place ce dispositif partout à travers le territoire national pour permettre à la république de retrouver la cohésion qui lui manque tant. Le coût d’un tel projet est vraiment dérisoire.  J’ai traduit cette expérience  en un livre : Le diplôme d’accès aux études universitaire (Daeu) : un ascenseur social ? Editions du bord du Lot, 2013, préfacé par le professeur Yves Lignon, un grand acteur de ce dispositif. Ce projet ferait passer le nombre de diplômés de 5 000 à 50 000 par an, avec une hypothèse basse. Si vous le souhaitez, je vous en adresserai un exemplaire.

 J’ai soumis ce projet à un premier ministre dont le cabinet m’a manifesté beaucoup d’enthousiasme. Hélas, celui-ci n’eut aucun effet sur les départements du ministère de l’éducation nationale qui l’enterrèrent rapidement. Mais comment peut-on bannir un projet éducatif qui ne peut qu’être bénéfique à la nation ? La raison est bien simple : je dénonce ma spoliation réalisée avec la complicité des services de l’état et de la justice. En effet, j’ai été spolié comme le furent les juifs au cours des pages sombres de l’histoire de France et ce fait bouleverse bien des secteurs de la société et leur renvoie des images douloureuses du passé. En m’éliminant de la scène publique, ils pensent rendre invisible une spoliation qui salit la République même. Ils ne se rendent même pas compte qu’ils croient me punir alors qu’en réalité ils punissent la France et les français.

Ma spoliation s’est produite en 2008… et elle dure encore. C’est dire l’ampleur de la tâche.

Si je vous expose l’intérêt du Daeu c’est pour souligner l’importance de la masse critique des exclus en espérant que leur nombre connaîtra une réelle décroissance. C’est la seule voie démocratique pour lutter contre l’islamisme et le séparatisme qui n’est que la conséquence du chaos dans lequel se trouve le système social et de sa composante principale : le système éducatif.

Je ne m’attarderai pas sur l’enseignement de l’histoire commune aux deux pays aux différents cycles de l’enseignement et dont vous soulignez l’importance. Cependant, il est aussi possible de mettre à jour la matière « histoire » dans le cadre du Daeu.  Cette matière, en l’état de la réglementation, est optionnelle. Ce statut peut être maintenu. De même et cela mérite d’être souligné, au titre des matières obligatoires, certains candidats choisissent la langue arabe. Au terme de mes 12 années d’expérience, je peux dire que la cohésion nationale s’affirmait au fil des ans comme l’épanouissement personnel qui se mettait au service de la société.

Ce même Daeu, peut être proposé aux descendants de harkis également frappés par l’échec scolaire. Ainsi, ils renoueront avec le succès et le sentiment  d’appartenance  à la collectivité nationale.                                                   

Imaginez un seul instant, que ce Daeu se mette en place en Algérie (Mais aussi en Tunisie, au Maroc et partout en Afrique) pour qu’il devienne  le trait d’union entre les nouvelles générations. (Aujourd’hui, des structures privées proposent le Daeu au Maroc mais à un prix qui exclut les classes défavorisées.). Avec une telle ambition, les gouvernements comme les citoyens, de part et d’autre de la Méditerranée, seraient les grands gagnants.

Vous avez aussi exprimé le vœu des harkis, au grand âge, d’être enterrés sur la terre de leurs ancêtres. Cette démarche vous honore. J’ai personnellement, recueilli ce souhait à l’occasion du travail exploratoire à l’écriture de mon roman. L’Algérie et les Algériens qui ont mûri, sauront ouvrir leurs cœurs à ceux qui n’ont jamais cessé de souffrir.

Enfin, je dois vous dire que beaucoup d’Algériens vivant en France, qui ont servi la République et le peuple français mieux que quiconque, et qui sont, aujourd’hui,  victimes d’injustices, comme si pour eux,  la période coloniale ne s’était jamais arrêtée, leur situation doit faire l’objet d’un examen attentif selon toute procédure et tout moyen que l’Etat jugera nécessaire à la réparation des préjudices subis.

Vous concluez votre rapport en citant  un certain nombre de structures essentiellement associatives qui œuvreraient en faveur de l’amélioration des relations entre la France et  l’Algérie. Il n’en est rien pour la majorité d’entre elles, pire encore,  elles en sont un facteur de détérioration. Les associer à une démarches de réconciliation des mémoires c’est vouer le projet à l’échec. Je ne cite que 2 exemples : Sos-Racisme au lourd passé passif et son Président, affichent  un mépris sans nom à l’égard des algériens qui les sollicitent,  de même « Le Maghreb du livre » malgré mon insistance, n’a jamais voulu m’accueillir pour « La forfaiture du corbeau »… pourtant au cœur de l’histoire commune. Si la raison principale est le fait que je ne fais pas partie du cercle des amis, alors quel crédit accorder à cette association ?

Si vous souhaitez m’accueillir en entretien pour approfondir un point ou un autre,  je m’y rendrai avec beaucoup de plaisir.

Je vous prie de croire, Cher Monsieur, à l’expression de mes sincères salutations.

Rabah Bouguerra

 

1 commentaire:

Dites ce que vous voulez mais seulement la vérité ... Attention la diffamation, l'injure sont des délits.

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